Voir la guerre à travers l’objectif d’une caméra

Le 26 août 2015

Hugh McCaughey a une trentaine d’années et travaille dans une boutique d’appareils-photo à Vancouver lorsqu’il s’enrôle dans l’Unité de film et de photographie de l’Armée canadienne en 1942. Avant la fin de la guerre, il voyagera en Angleterre, en France, en Hollande et en Allemagne, tournant des images de combats et d’autres faits et gestes derrière les lignes.

Pendant tout ce temps, il prend des photographies de la vie dans les camps, entre autres celle, aujourd’hui célèbre, d’un jeune artiste de guerre nommé Alex Colville. Il conserve méticuleusement les traces de son travail dans son carnet de tournage et ses journaux. Il garde même de courts-métrages que des préposés au traitement des films en Grande-Bretagne lui renverront pour qu’il puisse en vérifier les plans. Une fois montés, les films étaient ensuite visionnés par des censeurs et des monteurs de nouvelles, puis livrés au Canada afin d’être projetés dans les salles de cinéma.

Des images pour la postérité

« Il incombait à l’Unité de filmer et de photographier les Canadiens à la guerre, y compris dans des situations de combat, explique Carol Reid, spécialiste des collections, au Musée canadien de la guerre. Leurs séquences ont influencé bon nombre des représentations que se font encore les Canadiens de la guerre. Grâce au sergent McCaughey, nous avons aujourd’hui une chronique des circonstances dans lesquelles ces images ont été créées. »

Un témoin du jour J

Chaque semaine, le sergent McCaughey écrivait à sa famille et à ses amis de longues lettres (environ 215 au total) dans lesquelles il décrivait les dangers auxquels étaient exposés les caméramans de guerre. Juste après le jour J, par exemple, il expliquait à sa mère comment, après avoir été largué derrière les lignes allemandes au sein d’une unité parachutiste, l’un de ses camarades s’était frayé un chemin pour porter ses séquences aux Alliés.

Le jour J, il a lui-même filmé les blessés et les prisonniers retournant en Grande-Bretagne. « J’ai photographié des victimes anglaises, écrit-il, et j’ai vu des âmes brisées, mais l’impression donnée par les Canadiens, qui riaient et souriaient, était différente. Alors qu’il aidait un compatriote à sortir du bateau, un aide-soignant canadien continuait de plaisanter et répondait avec enthousiasme à mes questions. »

Être caméraman de guerre

Un caméraman allait au combat, muni d’armes légères. En plus de savoir se battre, au besoin, il devait être tour à tour un technicien chevronné, un reporter, un vendeur et, parfois, un diplomate capable d’interagir avec tous, sur le terrain avec un soldat ou au quartier général en compagnie d’un haut gradé militaire. Ces compétences lui étaient utiles pour être en mesure de capter la séquence qui ferait le récit des événements pour les Canadiens au pays.

Une précieuse collection

Une fois la guerre terminée, le sergent McCaughey rapportera ses carnets, ses courts-métrages et ses photos à la boutique d’appareils-photo de Vancouver. Ses proches et ses amis ont conservé ses lettres. L’entière collection, qui témoigne de la contribution de l’Unité de film et de photographie de l’Armée canadienne à la victoire des Alliés, a été donnée au Musée canadien de la guerre. Les grands risques courus par l’Unité pour protéger les images à l’origine des représentations que se font de nombreux Canadiens de la guerre lui confèrent d’autant plus de valeur.

« Le Musée possède quelques collections de correspondants de guerre comme Andrew Gillespie Cowan et Ben Malkin, et nous avons des photographies d’autres membres de l’Unité, observe Mme Reid, mais c’est la première fois que nous recevons des lettres et des journaux personnels d’un caméraman. Nous comptons mettre à profit ces précieux documents lors d’une prochaine exposition sur la guerre et les médias. »

Photo du haut : Lettre du sergent McCaughey, MCG 20140022-002_06-09-44_p1-4  Collection d’archives George-Metcalf, Musée canadien de la guerre

Photo du bas : Le sergent Hugh McCaughey, MCG 20140022-003                               Collection d’archives George-Metcalf, Musée canadien de la guerre

SGT Hugh McCaughey 20140022-003