Images du déplacement forcé des Canadiens japonais

Le 1er novembre 2013

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Canadiens et Américains d’ascendance japonaise de la côte du Pacifique ont dû abandonner maisons, métiers et entreprises pour été déplacés de force dans des camps de fortune à l’intérieur des terres. Vingt-cinq ans après les excuses des deux gouvernements, une rétrospective réunit des images de deux photographes qui ont immortalisé la vie quotidienne de ces personnes. Un puissant message aux générations futures.

Les photos de l’exposition Deux points de vue – Photos d’Ansel Adams et de Leonard Frank montrent les conditions de vie de quelques-uns des 22 000 Canadiens et 120 000 Américains d’origine japonaise qui ont été déplacés de force après l’attaque de Pearl Harbour. Les deux artistes ont cependant abordé ce même sujet de manière différente.

En tant qu’immigré allemand, Leonard Frank était souvent confronté à la xénophobie lorsqu’il habitait en Californie pendant la Première Guerre mondiale. Pour fuir les préjugés, il s’est installé à Vancouver, où il est devenu l’un des photographes les plus célèbres de la ville. En 1942, la British Columbia Security Commission (Commission de la sécurité de la Colombie-Britannique) lui a confié la mission de suivre au jour le jour le processus de déplacement forcé des Canadiens d’ascendance japonaise dans des camps situés à l’intérieur de la province.

Leonard Frank a photographié des bâtiments agricoles et commerciaux qui avaient été réquisitionnés pendant la guerre. Un bâtiment de concours hippiques servait de lieu d’inscription, tandis qu’une étable était devenue un laboratoire de produits laitiers et une cuisine diététique. Les classes se tenaient dans le jardin d’hiver.

En dépit de l’énorme tâche de réinstaller des milliers de personnes, le gouvernement a implicitement veillé à fournir le nécessaire dans des domaines vitaux, dont l’éducation, la santé et l’alimentation. Les personnes déracinées ont toutefois payé un lourd tribut ― qui est passé inaperçu — sur les plans affectif et économique : leurs propriétés ont été confisquées et vendues pour payer le coût de leur réinstallation forcée. Sur la plupart des photos, on voit ces personnes accomplir leur travail sans montrer le moindre signe de contrainte ou de perturbation. Une photo, probablement la plus poignante, montre la patinoire d’un aréna entièrement recouvert de rangées de lits vides, prêts à accueillir des centaines d’hommes.

À la même période, le célèbre photographe américain Ansel Adams a été tellement choqué par les internements effectués dans son pays qu’il s’est rendu à plusieurs reprises au Manzanar War Relocation Centre, un camp abritant 10 000 Américains d’ascendance japonaise.

À l’instar de Leonard Frank, Ansel Adams a pris des photos panoramiques afin de montrer l’ampleur du processus de réinstallation. Il a aussi photographié le quotidien des résidents. Ceux-ci sont décrits comme des Américains ordinaires s’efforçant de mener une vie ordinaire malgré les circonstances particulières; à preuve, la photo d’une partie de baseball organisée dans les limites du camp. L’une des images les plus poignantes est celle d’une lettre sur une table, à côté de la photo d’un fils bien-aimé, un jeune Américain d’origine japonaise qui porte l’uniforme de l’armée américaine.

Toutes les photos nous rappellent que ces personnes ont été arrachées à leur vie quotidienne et à leurs collectivités où leurs familles étaient établies depuis des générations. En 1988, les gouvernements du Canada et des États-Unis ont présenté des excuses à leurs citoyens d’origine japonaise, dans l’espoir qu’un tel geste ne se reproduise jamais plus.

Deux points de vue – Photos d’Ansel Adams et de Leonard Frank est présentée au Musée canadien de la guerre jusqu’au 24 mars 2014.

Photo de l'exposition Deux points de vue


Famille à Slocan ou à New Denver. Photo : Leonard Frank, JCNM 1994.69.4.16, Collection Eastwood