Des femmes peu connues à l’avant-garde de l’effort de guerre

Le 1er janvier 2016

« L’histoire devrait reconnaître les contributions multiples et variées des Canadiennes à l’effort de guerre en 1914-1918 et en 1939-1945, » affirme Stacey Barker, historienne intérimaire, Art et guerre, du Musée canadien de la guerre. « C’est ce que nous comptons faire grâce à l’exposition Grandes Guerres. Grandes Femmes. »

En voici trois exemples.

Edith Anderson Monture

Edith Anderson Monture est née en 1890 sur le Territoire des Six Nations de la rivière Grand, en Ontario. Elle était déterminée à devenir infirmière, mais la Loi des Sauvages (titre de la version de la Loi sur les Indiens en vigueur à l’époque) restreignait l’accès des membres des Premières Nations à l’éducation supérieure. Après avoir essuyé le refus de plusieurs écoles d’infirmières du Canada, elle s’est rendue aux États-Unis pour suivre sa formation. Première de classe, elle a tout d’abord occupé le poste d’infirmière d’école. Après l’entrée des Américains dans la Première Guerre mondiale, en 1917, Edith a servi outre-mer avec le U.S. Army Medical Corps plutôt qu’avec les infirmières canadiennes.

Dans un hôpital de campagne à Vittel, en France, Edith soignait des soldats qui avaient été blessés par balle ou gazés. Elle a écrit sur l’immense chagrin qu’elle a éprouvé en tant qu’infirmière. « Mon patient préféré, Earl King, celui qui m’avait adoptée comme sa grande sœur, est mort ce matin à 7 h 15. Une hémorragie s’est déclenchée à 3 h 15. Le pauvre garçon s’est évanoui immédiatement. Mon cœur s’est brisé. J’ai pleuré une bonne partie de la journée et je n’ai pas pu dormir. »

Une poêle, des ustensiles et une gourde se trouvent parmi les articles qu’elle a conservés tout le reste de sa longue vie en souvenir de son expérience de guerre.

Lorida Landry

Lorsque Lorida Landry est entrée à l’usine de la compagnie Singer Sewing Machine, en 1941, à l’âge de 21 ans, elle ne soupçonnait pas dans quelle mesure la guerre allait changer sa vie. Elle travaillait comme commis de bureau à Saint-Jean-sur-Richelieu, mais l’entreprise s’étant lancée dans la production de guerre, elle s’est retrouvée au sein de la chaîne de montage qui fabriquait des bombes. Elle vérifiait les amorces qui faisaient exploser les bombes et voyait à ce que les bouchons se vissent et se dévissent facilement. La cadence de la chaîne de montage était plus soutenue que celle du bureau, mais le meilleur salaire en valait la peine.

Pour sa part, Elphège Langlois travaillait à l’usine de munitions comme tourneur. Lorida et Elphège se marièrent en juillet 1943. Toutefois, en raison de la politique de Singer qui empêchait les femmes mariées de travailler à l’usine, Lorida a dû quitter son emploi. Parmi ses souvenirs du temps de guerre se trouvent deux douilles de munition que quelqu’un (probablement Elphège) a tournées pour en faire une paire de chandeliers.

Joan Bamford Fletcher

Une autre Canadienne, Joan Bamford Fletcher, a surmonté les obstacles liés au sexisme lors d’une mission qui lui a valu une reconnaissance publique, la distinction de membre de l’Empire britannique et un remarquable témoignage d’estime d’un ancien ennemi.

Engagée dans la First Aid Nursing Yeomanry en 1941, elle a fait son service en Écosse, où elle a été conductrice pour le compte de l’armée polonaise en exil. En 1945, elle a été envoyée en Indonésie afin d’aider à évacuer des prisonniers alliés. Prenant le commandement de 70 soldats japonais qui s’étaient rendus — mais qui étaient encore armés —, elle s’est servie de ces anciens ennemis pour escorter, depuis un camp d’emprisonnement japonais, quelque 2 000 civils néerlandais qui devaient traverser la jungle et un terrain occupé par des rebelles indonésiens hostiles. Elle a si bien réussi à amener son groupe en lieu sûr qu’en reconnaissance de sa bravoure, un officier japonais lui a remis un sabre de samouraï vieux de 300 ans qui appartenait à sa famille.

Les récits d’Edith Anderson Monture, de Lorida Langlois et de Joan Bamford Fletcher, ainsi que certains de leurs objets personnels, figurent dans l’exposition Grandes Guerres. Grandes Femmes. à l’affiche au Musée de la guerre, jusqu’au 3 avril 2016.

Image : Edith Anderson Monture, avec l’aimable permission de la famillle Moses.