Mode militaire ou militaire à la mode

Le 26 juillet 2010

À 15 ans, les surplus d’armées étaient le lieu de toutes nos trouvailles : bottes de combat, chaussettes de laine, parkas kaki et chapeaux d’aviateurs. Au grand désespoir de nos mères, le look militaire flottait dans l’air du temps…et se posait dans nos garde-robes. Mais par quelle porte dérobée l’influence militaire s’est-elle introduite dans l’univers de la mode?

Dissimuler, altérer, tromper, déguiser et proclamer

Chelsea Arts Club, Londres, 1919. C’est soir de fête : le « Great Dazzle Ball » bat son plein. Les invités exhibent leurs plus beaux atours inspirés des motifs bigarrés dont on peignait les navires, pour tromper l’ennemi. Le camouflage militaire, qui en est à ses premiers balbutiements, fait déjà une entrée remarquée dans l’univers de la mode.

De ces simples motifs peints à la main, les techniques de camouflage ont vite évolué et, à l’époque de la guerre du Vietnam, la pratique devient courante pour l’ensemble des troupes. Conflit controversé s’il en est un, cette guerre s’accompagne de nombreuses manifestations menées, entre autres, par des vétérans; en guise de protestation politique, ils descendent dans les rues en arborant l’uniforme. Il n’en faut pas plus pour que les jeunes contestataires découvrent les richesses des surplus d’armées. Les motifs de camouflage se transforment vite en symboles de rébellion que plus d’un artiste n’hésitera pas à s’approprier.

Du groupe punk-rock The Clash aux œuvres d’Andy Warhol, le camouflage militaire est récupéré dans tous les milieux et sous toutes les formes imaginables. Même les plus grands créateurs de mode s’en sont inspirés, en témoignent les robes de Jean-Charles de Castelbajac ou de Yohji Yamamoto présentement en exposition…au Musée canadien de la guerre.

La mode défile au Musée

Mais mode et camouflage ne se sont pas uniquement unis dans la salle d’exposition; le 4 juin dernier, 26 jeunes ont présenté le fruit d’un projet de collaboration entre le Musée et trois collèges de la région. Des étudiants et étudiantes de l’Académie de dessin de mode Richard Robinson et des écoles secondaires De La Salle et Canterbury ont ainsi été mis au défi d’imaginer et de confectionner des vêtements inspirés du camouflage; leurs créations ont fait l’objet d’un défilé de mode haut en couleurs, dans la galerie LeBreton du Musée canadien de la guerre.

L’espace d’un soir, donc, le Musée a vibré au rythme de la mode. Une salle de réunion a été transformée en loge pour le maquillage et la coiffure; la galerie d’exposition d’artillerie lourde et de véhicules militaires, quand à elle, a été agrémentée d’un podium digne des grands défilés. Motifs animaliers ou floraux ont rivalisé pour fondre robes et costumes de toutes sortes dans une nature d’ici ou d’ailleurs. Des insectes aux flocons de neige, en passant par la noirceur de la nuit et le sable du désert, toutes les inspirations étaient bonnes pour créer des pièces uniques.

Si le camouflage a été inspiré par les artistes du début du XXe siècle, voici un juste retour de balancier qui a amené nos jeunes créateurs à puiser leur inspiration dans une exposition colorée et surprenante.